Découvert grâce à John Kim's free RPGs on the web, l'excellent annuaire anglophone des JDRA, et hébergé sur la pépinière de talents qu'est 1KM1KT (l'équivalent anglais des Démiurges en Herbe, en beaucoup plus prolifique), Chronicles of the Drenaï est une excellente surprise, un tout petit "free RPG", simple d'accès, construit par un passionné à l'enthousiasme communicatif autour de l'oeuvre du prolifique et regretté David Gemmel, que certains spécialistes de la Fantasy qualifiaient volontiers de successeurs de Robert E. Howard (rien que ça !).
Gemmel, donc, dont les oeuvres furent traduites chez nous essentiellement par Bragelonne, et que l'on peut également découvrir en format poche.
"Il ne faut pas de courage pour mourir. En revanche, il faut du cran pour vivre"

D'autres personnages peuplent le cycle, dont notamment Waylander, un assassin en quête de sa propre humanité perdue. Tous évoluent dans un monde cruel et impitoyable, ravagé par la guerre. Tous souffrent de douloureux conflits intérieurs, sont taraudés par leurs propres démons et confrontés à des choix souvent cornéliens. Le dépassement de soi, parfois le sacrifice, jusqu'à la mort sont des thèmes courants dans ce cycle épique et inspiré.
Ce sont ces thématiques qui ont inspiré l'auteur de Chronicles of the Drenaï. Ainsi, au lieu des caractéristiques habituelles (force, vigueur, habileté, charisme, etc.), chaque PJ est défini par des "Passions", (Peur de l'Inconnu, Paresse, Colère, etc.), dix en tout, qui sont autant de faiblesses et que le joueur devra à chaque fois surmonter en lançant un D20.
Ainsi, si mon personnage, qui n'a rien d'un guerrier, est affublé d'un score de 14 dans la passion "Fear of Harm" (que je vais traduire très imparfaitement par "Peur de la Mort"), et qu'il se retrouve pris dans un combat, je devrais faire plus avec mon D20 pour pouvoir réussir un test de combat. Car oui, pour triompher au combat, il faut ne pas avoir peur de mourir, ne pas craindre la mort. La regarder droit dans les yeux et charger l'ennemi ! Autant dire que des guerriers comme Druss ou Waylander ont des scores très bas dans cet aspect !
Non seulement je trouve cette approche du jeu très originale, mais elle a en plus le mérite de favoriser ouvertement le roleplaying sans passer par des tonnes de descriptions verbeuses. Un concept brillant ! Des D20 bonus peuvent être débloqués en cours de jeu, notamment si le joueur fait des descriptions colorées de ses actions.
Chaque passion doit aussi être définie par un "tag", c'est-à-dire une phrase concept qui explique le score en question et donne des amorces d'intrigue au MJ. Par exemple, pour mon personnage peu combatif, le "tag" que j'associerai à mon score de 14 dans "Fear of Harm" pourrait être "Craint pour sa vie" ou "terrifié par la vue du sang" ou encore "Souhaite vivre à tout prix, loin de la folie des hommes", "Pacifiste"... Ce qui me passe par la tête au moment où je créé mon personnage, sachant que ce tag restera pour longtemps. Chacune des 10 passions étant ainsi affublée d'un tag, on créé rapidement un personnage vivant, avec ses qualités et ses défauts, ses contradictions, sa grandeur et ses bassesses.
Car avec 110 points à répartir librement entre ces 10 passions (minimum 5, maximum 18), votre personnage aura OBLIGATOIREMENT des défauts. Il aura aussi droit à trois traits (qui lui octroieront des D20 Bonus) un peu d'équipement, et c'est parti pour l'aventure !
Autre grande originalité du système, le PJ cumulera au fil de sa quête des points de Karma (pour chaque action héroïque) et de Dharma (pour chaque action anti-héroïque). Les deux scores se multiplient à la fin du jeu pour obtenir un score final de Catharsis et c'est le joueur, dont le personnage aura obtenu le plus haut score de Catharsis qui sera célébré par la tablée en fin de partie. Ce sera son joueur qui sera nommé le "héros" de la "légende" (partie de jeu) jouée ce soir-là.
QU'Y A T-IL D'AUTRE ?
En trente-deux pages, le jeu parvient à nous proposer l'essentiel. On trouvera donc :
- un système de magie, sobre et simple (2 pages), qui colle bien à l'univers low-fantasy imaginé par David Gemmel. Fans de D&D et de ses magos-pyrotechniciens-experts en effets spéciaux grandiloquents, passez votre chemin !
- les règles pour progresser en expérience (avec la fameuse Catharsis dont je vous parlais plus haut).
- une rapide description du monde des Drenaï (6 pages).
- quelques conseils (exemple de partie et une rubrique "comment créer un scénario")
- un scénario intitulé "Days of Blood and Fire" (3 pages) qui met tout de suite dans l'ambiance.
POUR UNE POIGNEE DE CRITIQUES DE PLUS :
Certes, la lecture de ces trop courtes règles nous laisse quelque peu sur notre faim :
- des exemples plus fournis de "tags" auraient été les bienvenus pour les joueurs en mal d'inspiration.
- De même que des PJ prétirés.
- Les romans ne sont ni présentés ni analysés, l'auteur partant du principe que le MJ sera lui aussi fan/lecteur de David Gemmel et donc, en terrain connu.
- Enfin, le scénario d'initiation est court et quelques autres auraient permis d'allonger la durée de vie du jeu et d'aborder diverses ambiances, diverses thématiques.
Cependant, il serait bien dommage de bouder notre plaisir. En l'état, Chronicles of the Drenaï est un excellent jeu, rapide, simple et original qui fait la part belle au roleplaying et à l'ambiance et qu'il me tarde d'essayer.
Enfin, il est indiqué sur le site de 1KM1KT que c'est là la version 2 du jeu. D'autres pourraient bien suivre, si le succès est au rendez-vous. A suivre donc, et d'ici là...
... BONS JEUX !
POUR EN SAVOIR PLUS :
Vous pourrez lire des infos supplémentaires suyr le cycle des Drenaï sur Wikipedia et sur le site Fantastinet.
Wikipedia, encore, propose également une biographie de David Gemmel (deux versions sont disponibles : en français et , plus complète, en anglais).
Enfin, le site officiel de Bragelonne présente tous les ouvrages traduits en français (CLIQUEZ ICI), avec des extrais de chaque livre ou presque et des interviews (dont une adressée au Guardian et intégralement traduite).