Avec l'écriture d'un article consacré à Aecyr
Gréne, m'est venu l'envie de parler en ces pages de ce grand ancêtre du Jeu de Rôle qu'est Rolemaster, jeu mythique paru pour la
première fois en 1982, toujours en activité de nos jours et qui connut de nombreuses déclinaisons.
I. ROLEMASTER, LE MYTHE :
Né au tout début des années 80 (avec le tout premier "Character Law", présenté à l'époque comme un supplément de règles optionnelles "pour tout jeu de rôle médiéval
fantastique"), Rolemaster est célèbre pour la richesse/complexité de ses règles, pour ses nombreux ouvrages de règles optionnelles (les "companions", traduits en
partie par Hexagonal dans les années 90 et autres "law" books), pour son souci de réalisme (dès sa création, le jeu entendait se démarquer d'AD&D, jugé
"irréaliste" et "peu crédible" du point de vue de la simulation) et surtout pour le détail incroyable de ses tables de coups critiques.
Il existe dans Rolemaster pratiquement une table pour chaque arme, plus des tables pour les maladresses "naturelles", de mouvement, à cheval, plus des tables
pour les différents types de sorts, classés par effets (froid, feu, électricité, etc.). Plus des tables pour les attaques naturelles : crocs; griffes/serres, piétinement (pour les éléphants,
les géants des collines...) ; constriction/strangulation (exercée par des serpents ou des bêtes à tentacules,krakens ou autres) ; etc.
II. LA POLEMIQUE :
Face à ce luxe de détails, à cette minutie pointilleuse, à ce souci d'exhaustivité jamais démenti au fil de ses suppléments, Rolemaster scinda en deux la petite communauté des
rôlistes.
D'un côté, le jeu, toujours vivant et actif de nos jours, après presque 30 ans de loyaux services, a ses fans irréductibles, séduits par une telle souplesse d'utilisation.
En effet, les "companion rules" proposent ainsi plusieurs dizaines de voies magiques, de classes et de races jouables, sans oublier de multiples règles optionnelles pour gérer la fatigue,
l'herboristerie, les voyages maritimes, les arts martiaux, les combats de masse, etcetera... En vérité, Rolemaster est plus une gigantesque "boîte à outils" qu'autre chose.
Chaque groupe de joueurs choisit ainsi les règles qui lui conviennent, ignorant les autres.
D'un autre côté, Rolemaster repousse, effraie certains joueurs/MJ. Comment gérer un "monstre" pareil ? Telle est la question que posent ses détracteurs, abasourdis par tant de
règles. A la décharge du jeu, notons que 70-80% (environ, je laisse aux spécialistes de ce jeu le soin d'affiner ce chiffre) d'entre elles peuvent être plus ou moins mises de côté par le MJ, sans
que celà ne nuise au bon fonctionnement du jeu. D'ailleurs, la base du jeu, ultra-simple, reposer sur le simple jet d'un D100, avec lequel le joueur doit obtenir le plus haut score
possible.
III. TOUJOURS PLUS SIMPLE... :
C'est cette base de jeu, simplissime, que les créatifs d'ICE se sont efforcés de préserver lorsqu'ils imaginèrent des versions "épurées" de leur jeu. Tout d'abord avec JRTM, le Jeu de Rôle des Terres du Milieu (1984), le premier consacré à l'univers de JRR Tolkien. Une
référence, aujourd'hui décriée, mais qui connut un réel succès et de nombreux et réputés suppléments ("Moria", "les cavaliers du Rohan", "le royaume perdu du Cardolan",
etc.).
Ensuite, en 1991, une étape de simplification supplémentaire est franchie avec le Jeu d'Aventure du Seigneur des
Anneaux. Exit le D100. Place aux jets de dés avec 2D6 (tiens ? Le même principe que dans le récent JDR "Le Seigneur des Anneaux", créé par Decipher
Games ?).
Parallèlement, ICE continua d'étoffer sa gamme Rolemaster, déclinée en Space Opera (Space Master), en JDR contemporain (avec le supplément "Modern
Law"), en suppléments "mythico-historico-fantastiques" ("Vikings", "mythic greece", "mythic Egypt", etc.) et même en cyberpunk, avec
"Cyberspace", qui fut l'un des premiers JDR du genre et précéda (si je ne m'abuse) Shadowrun.
Par la suite, à la fin des années 90, ICE perdit la licence (coûteuse) pour exploiter en jeu l'univers de Tolkien, mais continua à produire des JDR, toujours sur la base de
Rolemaster.
IV. DE NOS JOURS :
Pour les auteurs du jeu, il y a clairement un malentendu sur la prétendue "injouabilité" du système. Afin de le dissiper, deux nouveaux jeux furent créés :
- tout d'abord, HARP (192 pages), soutenu à la fois par son site (www.harphq.com) et par sa version "light" des règles. Une version téléchargeable gratuitement, totalisant 88 pages! Toutes les règles
essentielles pour jouer sont regroupées dans cet épasi fascicule, mis à la disposition des joueurs !
- ensuite, Rolemaster express (RMX), un livert condensant toutes les
règles essentielles de RM en 88 pages pour unprix défiant toute concurrence : 7,50$.
Enfin, je citerai une troisième version, plus complexe : Rolemaster Fantasy
Roleplaying (RMFRP). Ce dernier JDR occupe une place intermédiaire entre RMX et RMC (pas la radio ! Je parle ici
de Rolemaster Classic, la version complète et non-expurgée des règles).
Avec toutes ces déclinaisons, ICE fait le pari d'un système de règles presque générique et universel, et disponible en plusieurs formats (de "joueur quasi-débutant" à "vieux grognard"). Si les
suppléments historiques et le JDR Cyberspace sont aujourd'hui épuisés, Space
Master continue l'aventure avec une troisième édition. Enfin, ICE a conservé son univers-maison, "Shadow World" et s'en est même créé un nouveau pour HARP : "Gryphon World", orienté Post-Apo, avec un léger air d'Earthdawn.
CONCLUSION :
Bref, contre vents et marées, la petite compagnie de Charlotteville, en Virginie, continue son petit bonhomme de chemin.
Amis anglophones, si vous voulez tenter l'aventure, une seule adresse (pour télécharger HARP lite) : http://www.harphq.com/free_downloads/3000L_HarpLite.pdf
A tous et à toutes...
... Bons downloads et bons jeux !