"Spartacus : Blood and Sand"
Du sang et du sable.
Deux mots qui disent tout, qui résument l'univers abrupt et cruel des jeux du cirque. Deux mots qui résument également à merveille l'ambiance crépusculaire de la série télévisée la plus spectaculaire, la plus osée jamais portée à l'écran.
Je viens en effet de visionner en intégralité la saison 1 de la série et je suis resté pantois. Assurément, c'est là une série de qualité (si, si, j'insiste !), qui a tous pour intéresser bon nombre de rolistes. Voyons de quoi il retourne.
I. UN PARFUM DE SCANDALE :
Produite entre autres par Sam Raimi (à qui l'on doit la cultissime trilogie gore Evil Dead, mais aussi les trois adaptations cinématographiques de "Spiderman" et les séries télé "Hercule" et "Xena, warrior-princess"), "Spartacus" est diffusé outre-atlantique sur la chaîne payante Starz.
Le "buzz" autour de la série est alors loin d'être flatteur. La série fait en effet parler d'elle pour son approche crue et sans concessions de la Rome Antique, qui lui vaut d'être classée "TV-MA" ("MA" pour "Mature Audience"), c'est-à-dire interdite aux moins de dis-sept ans. De fait, de nombreuses critiques lui font un accueil au mieux mitigé. Certains ont qualifié la série de "racoleuse", "complaisante" et "flattant les bas-instincts du public". Qu'en est-il ?
Avant d'aller plus loin, précisons tout d'abord que la classification "TV-MA" a aussi touché des séries comme "Nip/Tuck", "South Park" ou encore "The Shield". En clair, comme toutes les classifications, la mention "TV-MA" ne veut pas dire grand chose, tant ces séries sont différentes sur le fond et sur la forme.
Maitenant, oui, la série est ouvertement violente. Les effets sanglants sont légion,
les combats furieux. Il y a des démembrements, des décapitations, des crucifixions, des eviscérations... Bref, des combats à l'arme blanche, bien saignants.
Oui encore, la série use et abuse des scènes érotiques. Le sexe est montré de façon frontale, via plusieurs scènes d'accouplements et d'orgies assez gratinées. Il est également présent dans les dialogues, souvent crus et orduriers de plusieurs protagonistes.
Enfin, dernier reproche fait à la série : "Spartacus" reprend sans vergogne l'esthétique du film "300" : omnipotence des images de synthèse (pour masquer le manque de moyens ?) et des ralentis, effets visuels "clipesques" à souhait, gerbes de sang giclant de façon stylisée...
II. FICTION ET VERITES :
Neanmoins, tous ces partis-pris esthétiques se justifient, à mon humble avis.
D'une part, parce qu'ils donnent une identité forte à la série, lui permettant de se démarquer de ses "grands frères" historiques (le film éponyme de Stanley Kubrick, avec Kirk Douglas, mais aussi les séries télé "Rome", "Moi Claude Empereur", "Massadah" et quelques autres encore) tout en flirant à plusieurs reprise avec le fantastique, voire l'Heroic-Fantasy.
D'autre part, parce que tous ces choix, combinés ensemble, permettent de dresser un portrait
saisissant de la Rome Antique. Une Rome décadente, arrogante, imbue de sa soi-disant supériorité sur les autres peuples et lentement corrompue de l'intérieur. Ce que la série nous démontre, au
fil de son intrigue, c'est comment la violence de la civilisation romaine a fini par la gangréner et la détruire.
Cette violence militarisée, institutionalisée, tournée initialement contre les ennemis de Rome (les gaulois, qui mirent Rome à sac par deux fois, Carthage, l'Egypte de Cléopatre, etc...) imprègne également les jeux du cirque. Ces jeux, qui étaient autrefois des cérémonies funéraires, sont devenus au fil du temps des divertissements sanglants, mais aussi des outils de propagande mettant en scène la gloire de Rome.
Elle est présente, enfin, dans les rapports de maîtres à esclaves. Sans que quiconque s'en rende compte, cette violence élevée au rang de distraction finit par vicier tous les rapports sociaux et humains.
Il n'y a, dans la Rome de "Spartacus", aucune place pour la compassion. Comment pourrait-il en être autrement dans une civilisation esclavagiste ? C'est-à-dire, une civilisation fondée essentiellement sur des rapports de force ?
Ces relations dominant-dominé, qui scindent la société en deux (hommes libres d'un côté, esclaves de l'autre) finissent par contaminer tous les rapports humains : entre maîtres et serviteurs, entre maris et femmes, entre parents et enfants, entre amis, entre concurrents (la rivalité meurtrière entre les deux lanista romains, Batiatus et Solonius). A cet égard, il est éloquent que les seuls véritables liens d'amitié dans la série, sincères, soient noués par des esclaves.
Dominer ou être dominé. Soumettre ou être soumis. Il ne semble y avoir aucune alternative, aucun
échappatoire.
Ainsi, le gladiateur Varro est un ancien homme libre, un romain de pure souche qui est tombé en esclavage pour rembourser ses dettes de jeu !
C'est dans cette aliénation continuelle, dégradante pour ceux qui la subissent, que nait la révolte de Spartacus.
III. LA CHAIR ET LE SANG :
Pour finir cette critique, j'ajouterai que le scénario, habile, sait nous tenir en haleine du début à la fin et ménage de nombreux rebondissements. J'avoue m'être pris au jeu, avoir vibré pour Spartacus et m'être demandé comment les scénaristes allaient nous mener au dénouement fatal. Je n'ai pas été déçu.
Et si la série semble peiner de faibles moyens financiers, elle est portée par d'excellents comédiens qui, tous, se sont investis dans leur rôle, à fond. Charismatiques, torturés, assaillis par le doute ou bien aveuglés par leurs ambitions, les personnages de "Spartacus : Blood and Sand" prennent vie sous nos yeux, vibrants de vie, luttant pour leur survie dans un monde sans pitié.
Mention "Bien" également pour la musique de la série, signée Joseph Do Luca, épique à souhait, et qui saura sonoriser à merveille vos prochaines parties de JDR, quel que soit le jeu méd-fan que vous pratiquez (sauf Pendragon, peut-être).
En conclusion, amis rôlistes, si vous êtes fans d'Heroic-Fantasy sauvage, de Bloodlust à Conan, en passant par Dark Sun, si vous aimez l'action, les scènes de combat et l'aventure, alors ne passez pas à côté de cette excellente série !
VAE VICTIS !!
ET BONS JEUX A TOUS ET A TOUTES !
POUR EN SAVOIR PLUS :
EN FRANCAIS :
Si j'ai découvert la série pour la première fois dans le magazine Mad Movies (loués soient ses rédacteurs !), il me faut aussi citer l'article paru chez mes compères de la taverne Au Bon Rôliste : Sly, Karibou et Soshi. Je profite de l'occasion pour les saluer au passage.
Casting détaillé, actualités de la série, photos, critiques de spectateurs et autres informations vous attendent sur la fiche Allociné de la série. Vous pourrez ainsi y découvrir une interview sous-titrée de l'actrice Lucy Lawless (Lucretia).
Afin de vous proposer d'autres points de vue que le mien, voici quelques critiques glanées sur le net, sur les sites excessif.com, le blog du cinéma, serie addict, Telerama, le blog 100% séries, le blog TV-news, etc.
Je ne mentionne la page du site wat.tv (intitulée
"Spartacus-nudité-voyeurisme" : c'est tout ce qu'ils auront retenu, ces c... ! ) que pour l'interview longue durée (27 minutes !) de Lucy Lawless et Peter Mensah (Dottore).
Hélas, pas de sous-titres cette fois. Do you speak english ?
EN ANGLAIS :
Divers goodies (fonds d'écran, widgets, icônes, jeu vidéo pour l'I-phone, etc.) vous attendent sur le site officiel de la série. Le casting détaillé de la série, l'actualité de la série, ses produits dérivés sont également présents. A noter la possibilité de télécharger les scripts de la série (seul le script de l'épisode 1 est gratuit. Dommage).