Samedi 13 octobre, grand moment ! Après un repas convivial et animé en compagnie de vieux camarades de la Fac, j'ai pu enfin jouer au vénérable Heroquest, LE mythique jeu de plateau édité conjointement par les studios Games Workshop et par le géant du jeu Milton Bradley (MB).
Pour ceux qui ne connnaissent pas, Heroquest est un pur jeu de "dungeon crawling", situé dans le monde médiéval-fantastique de Warhammer. L'iconographie et les figurines ne laissent planer aucun doute à ce sujet : goblins, orcs et skavens typiques du Vieux Monde sont les adversaires typiques des joueurs au cours de quêtes épiques et riches en rebondissements (mais j'y reviendrais).
Le jeu imite d'ailleurs la structure des JDR, avec un "Meneur de Jeu" (le Sorcier) qui pose les monstres, pièges et trésors (ce dernier a même un écran de MJ à sa disposition), et des joueurs (les Aventuriers) qui dirigent chacun leur personnage. En ce sens, il se distingue des deux autres productions GW/MB que sont Space crusade et Space Hulk, où les joueurs dirigent chacun un squad de soldats.
Traduit en français et largement diffusé dans les grands magasins et supermarchés de France et de Navarre, Heroquest est donc un jeu mythique des années 80. Des règles simples (à la manière des Livres Dont Vous Êtes Le Héros). Du matériel à profusion (cartes, pions, marqueurs, figurines en plastique, dés spéciaux). Une iconographie riche. Plusieurs scénarios et des extensions qui rajoutent du matériel de jeu. Pour toutes ces qualités, Heroquest est devenu un classique du genre, qui bénéfice encore aujourd'hui d'une fanbase dévouée et dynamique. C'est en quelque sorte l'ancêtre des jeux de Dungeon Crawl modernes (Descent, Doom, Dungeons & Dragons the boardgame, Claustrophobia, etc.).
Bon. Voilà pour la théorie. Et ma partie d'hier alors, comment ça s'est passé ?
Tout d'abord, l'ami qui avait la boîte d'Heroquest a fait un chouette travail en récupérant et en imprimant du matériel sur le net. Nous avions chacun notre feuille de perso au format A4, très belle, notre fiche de classe (qui résume nos capacités) et un pense-bête qui récapitule toutes les actions possibles durant notre tour. Le tout était imprimé sur du papier épais de couleur beige, ce qui donnait un aspect parchemin très agréable.
Il a également eu la bonne idée de faire du "proxy", c'est-à-dire de récupérer des figurines d'autres jeux pour compléter la boîte et diversifier les possibilités de jeu. C'est ainsi que j'ai pu jouer un paladin, représenté par une magnifique figurine Rackham. Un autre joueur a pu endosser le rôle de l'assassin (redoutable en attaque, mais très mauvais en défense, donc fragile).
mon personnage, Ser Rordrik von Vornheim. Paix à son âme.
Côté règles, le jeu fait appel à des dés à six faces spéciaux. Trois faces avec un crâne (pour les "toucher"). Deux faces avec un bouclier blanc (pour la parade du héros). Un bouclier noir (pour la parade du monstre). Un dé à six faces ordinaire peut donc remplacer sans problèmes le dé spécial :
1, 2, 3 : touché !
4, 5 : parade (pour les aventuriers uniquement)
6 : parade (pour le monstre uniquement)
Durant un combat, l'attaquant lance un certain nombre de dés (en fonction de ses capacités). Chaque crâne représente une touche. Puis le défenseur fait de même et chaque bouclier annule un crâne. Les crânes non-annulés font perdre 1 point de "Corps" au personnage attaqué. A zéro PC, le personnage est grièvement blessé. A (-1), il meurt.
Naturellement, ces probabilités sont modifiées par le nombre de dés lancés. Ainsi, mon personnage, un paladin, peut lancer 2D en attaque et 3D en défense (4D s'il affronte un serviteur du Chaos).
Ci-dessus, ma fiche de perso (à droite), celle du nain (à gauche), et le plateau de jeu. Les sopalins ? Ce fut pour éponger le café renversé par un joueur maladroit. Tsss...
La découverte du jeu fut émaillée de surprises.
Tout d'abord, les monstres vaincus ne rapportent aucun XP ! Les affronter est donc fastidieux et usant. La plupart (gobelins, orcs) ne sont pas trop dangereux mais une blessure est toujours possible avec un peu de malchance. Pire, il n'y avait pas de soigneur dans notre groupe. Ceux qui trouvaient des potions de soins avaient de la chance ! Les autres (moi compris) commençaient à réaliser dans quel guépier ils s'étaient fourrés.
On est donc dans la logique d'un JDR old school à la AD&D. L'important, c'est de survivre, donc de rationner au mieux ses ressources (potions de soins, points de vie) pour tenir le plus longtemps possible. Je ne sais pas s'il y a une règle optionnelle pour gérer la lumière (avoir des torches, une lanterne... Ou pas !), mais si c'est le cas, elle va faire des ravages ("mince, j'ai plus de feu ! Quelqu'un peut-il m'éclairer ? ... (silence) Ohé ? ... (re-silence) Y a quelqu'un ???")
Seconde surprise : le jeu mise donc sur la coopération. Certains monstres sont très costauds et il vaut mieux les attaquer en groupe. L'entraide peut aider à survivre. Jouer perso est un très mauvais calcul (j'ai perdu mon personnage comme ça). Il faudrait donc abolir les habitudes prises avec d'autres jeux de plateau plus compétitifs.
Sauf que (troisième surprise), les mécanismes du jeu n'incitent pas à la coopération !
D'abord, parce que chaque personnage se déplace de 2D6 cases. La tentation est donc grande d'utiliser son score de déplacement à fond (par exemple, si on tire 10, 11 ou 12) plutôt que d'attendre les lambins qui trainent derrière.
Ensuite, parce que les récompenses sont individuelles. Par exemple, celui qui tuera le chef orque Ulag gagnera 100 pièces d'or. Les autres n'auront rien du
tout. Ah si, on les remerciera au village (s'ils reviennent!) pour leurs hauts faits d'arme.
Enfin, chaque personnage a droit à une action et à un déplacement. Or, chercher un trésor compte comme une action. Sachant que la pile de cartes trésors s'amenuise au fur et à mesure pour ne plus contenir que des pièges et des monstres errants, le calcul est vite fait et tout le monde recherche des trésors au lieu de chercher des portes secrètes ou des pièges. Premier arrivé, premier servi. Le nain bénéficie d'un avantage non-négligeable puisqu'il peut piocher 2 cartes trésors et choisir celle qu'il conserve !
Tous ces éléments combinés font que le jeu se révèle très riche en tensions et en rebondissements. Ajoutez à cela la possibilité de piller le cadavre d'un camarade décédé et vous imaginez déjà les tentations de certains de poignarder dans le dos leurs petits camarades aventuriers, jugés mieux lotis.
Ci-dessus, les aventuriers s'enfoncent dans le donjon. En rouge, les hommes d'armes, des suivants recrutés respectivement par le nain (à droite. On ne le voit pas, car il est à demi caché par une porte) et par l'assassin (à côté de la cheminée).
J'en arrive à la meilleure nouvelle, celle qui justifie à elle seule cet article : TOUTES LES REGLES DE HEROQUEST SONT DISPONIBLES EN FRANCAIS SUR LE NET !
Des fans français du jeu ont en effet mis en ligne l'ensemble des règles parues, y compris des traductions des suppléments restés inédits chez nous !
Les principaux sites (en français) sont :
heroquest-reloaded.blogspot.fr
heroquest.over-blog.fr (alias "Heroquest France")
Mais il faut aussi citer le Wiki dédié au jeu, les nombreux forums, les sites anglais et américains (comme yeoldeinn.com) qui proposent eux aussi une foultitude de matériel inédit...
Et là, c'est que du pur bonheur ! Heroquest a eu droit à plusieurs extensions qui rajoutent à chaque fois des figurines inédites, des quêtes à accomplir, des nouveaux personnages (druide, clerc, voleuse, pourfendeur...), des nouvelles règles (les poisons, le mode solo, la boutique de l'alchimiste...) des nouveaux sortilèges, trésors, parchemins, objets magiques, potions...
Il y eut même une version "Advanced", utilisant des D12 classiques et plus proche du JDR (on pense très fortement à Warhammer lorsqu'on découvre la feuille de perso. GW a-t-il voulu établir une passerelle vers le JDR et/ou son célèbre wargame ?).
Tout cela est gratuit. Avec un peu de proxy, vous devriez pouvoir trouver assez de figurines pour remplir correctement vos futurs donjons. Et puis Warhammer, le jeu de batailles est là avec son catalogue ostentatoire (votre portefeuille y survivra-t-il ?).
Un voyage dans le temps... Remontons jusqu'en 1989 !
Bref, voilà un excellent jeu qui continue de vivre grace aux fans, plus de vingt ans après sa sortie, alors qu'il n'est plus commercialisé.
Une fois encore, l'amour des fans, l'engouement pour un jeu de qualité a raison des considérations bassement mercantiles qui, parfois, vouent injustement un jeu à l'extinction. Et c'est une bonne chose.
Ne passez pas à côté de Heroquest, le jeu en vaut vraiment la chandelle !
BONS JEUX A TOUS ET A TOUTES !
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Valnar Nightrunner 02/12/2015 03:30
Leatherface 06/05/2013 19:08
olivier rousselin 07/01/2015 07:43
HeroQuest Remaster 07/12/2014 17:40
olivier rousselin 08/05/2013 19:14
EtienneB (Aldar) 20/10/2012 07:16
olivier rousselin 20/10/2012 10:41
EtienneB (Aldar) 20/10/2012 06:56
olivier rousselin 25/10/2012 10:44